Au Clos Y, carte blanche est donnée à l'art culinaire libéré.

Pour Yoshitaka Ikeda, qui naît à Osaka en 1977, les premières choses qui le lient à la cuisine sont les conseils de son père, originaire de Corée du Sud, de sa mère brillante cuisinière et la préparation d'une omelette dont il se souvient encore.


Il quitte son île pour la France

Après des études classiques, son échec à l'examen de médecine et l'obtention de sa nationalité japonaise, Yoshitaka hésite entre trois parcours bien différents : devenir avocat, yakuza ou cuisinier. Pour notre plus grand bonheur, il se décide pour la troisième option et à l'idée audacieuse d'apprendre la gastronomie sur le tas. Il s'engage alors dans un restaurant de sa ville, où il s'initie à une cuisine japonaise et européenne. A 23 ans, bien décidé, il quitte son île pour la France et trouve une place à fécole d'arts culinaires le Cordon Bleu ou il se forme à la gastronomie française.

Il trouve ensuite un premier stage au Passiflore, dans le 16ème arrondissement, aux côtés de Laurent Durand, meilleur ouvrier de France en 1982. Mais sa fermeté ne lui suffit pas à obtenir un visa pour rester en France, et il retourne donc au Japon au bout de deux ans seulement. Loin d'être découragé, il devient alors chef au restaurant Le Clos, une institution d'Osaka fondée par Isao Kuroiwa, où il affirme et exprime sa passion pour la cuisine française repensée au goût nippon; une des signatures de la maison étant la présence de baguettes aux côtés des fourchettes et couteaux.

LE DÉCLIC

Yoshitaka a toujours été inspiré par ses parents, et notamment sa mère qui mériterait selon lui une étoile au guide Michelin. Mais sa vraie révélation arrive quand il devient chef au Clos d'Osaka.

Finalement en 2010, il revient en France et entre chez Guilo Guilo où il va adorer continuer à apprendre. Aux côtés du chef Elichi Edakuni qui est rigoureux, passionné et créatif il se forme ainsi aux techniques et aux recettes adaptées aux menus omakase - où le client s'en remet au chef - découvre la culture du kuzuchi kappo, qui redéfinit les traditions de Kyoto, et comprend finalement que son amour de la gastronomie est aussi un amour d'une liberté exigeante.

C'est d'ailleurs porté par ces principes qu'il ouvre en 2014 le Clos Y à Paris, avec d'abord l'envie de servir au comptoir des poissons frais, avant d'imaginer un menu Carte Blanche qui lui permettra de se réinventer au fil des saisons et de son humeur. La, notre chef se plaît à cuisiner à l'instinct et avec une touche de folie.

Aussi, ce n'est pas simple de résumer ce que l'on déguste au Clos Y, tant la carte est repensée chaque jour. Selon les jours, le sashimi de bar est au yuzu et au miso, les carpaccios de homard dressés de shiso, le risotto de girolles servi avec de l'anguille fumée, le bœuf avec de l'okura ou le foie gras fumé au binchotan.

Mais chaque surprise est heureuse, et accompagné de sa cheffe-pâtissière Nagatomo Kaoria, Yoshitaka nous donne simplement envie de fermer les yeux, de lui faire une confiance aveugle et de se laisser porter par son idée si inventive de la gastronomie franco-nippone.

-3O Chef.fes Japonais.es à Paris: Guide affectif et gustatif

Philippe ROUX

Éditions METSRACINES